Indignez-vous ! est un essai de Stéphane Hessel publié en octobre 2010. Je viens de lire cet opuscule écrit par un jeune homme de 93 ans, qui défend l’idée selon laquelle l’indignation est le ferment de l’« esprit de résistance ».
Pour lui le « motif de base de la Résistance, c’était l’indignation ». Certes, les raisons de s’indigner dans le monde complexe d’aujourd’hui peuvent paraître moins nettes qu’au temps du nazisme.
Mais « cherchez et vous trouverez » : l’écart grandissant entre les très riches et les très pauvres, l’état de la planète, le traitement fait aux sans-papiers, aux immigrés, aux Roms, la course au “toujours plus”, à la compétition, la dictature des marchés financiers et jusqu’aux acquis bradés de la Résistance – retraites, sécurité sociale…
Alors, on peut croire Stéphane Hessel, et lui emboîter le pas, lorsqu’il appelle à une « insurrection pacifique ».
Publié par une petite maison d’édition de Montpellier – Indigène éditions – l’ouvrage ne dispose d’aucune promotion médiatique. Pourtant, rapidement, ce livre de 32 pages, vendu 3 euros, devient un phénomène d’édition en se vendant à 950 000 exemplaires en 10 semaines[]. Des traductions sont envisagées en slovène, coréen, finnois, ainsi qu’au Liban et en Israël[]. Stéphane Hessel a déclaré au Parisien qu’il avait l’intention de reverser ses droits d’auteur à diverses causes, parmi lesquelles le financement du Tribunal Russell sur la Palestine[].
Le succès tient en partie à la figure[] de son auteur, Stéphane Hessel, né en 1917 en Allemagne d’un père juif, résistant contre le nazisme, déporté à Buchenwald, secrétaire de la Commission des Droits de l’Homme[] quand celle-ci rédigea la Déclaration universelle des droits de l’homme, puis diplomate[]. La forme également, un format court à un prix minime, a probablement facilité sa diffusion[].
Le succès tient notamment[] au rapprochement établi par Hessel entre les idées défendues par les auteurs du Programme du Conseil national de la Résistance (engagement politique de la société civile, primauté de l’intérêt général sur l’intérêt financier, syndicalisme, solidarité des générations, etc.), et ce qui indigne Hessel aujourd’hui : existence des sans-papiers, mauvais traitement réservé à la planète, écart des richesses dans le monde. []L’ouvrage, paru le jour où la réforme des retraites est votée, semble aussi rencontrer une vague de fond de mécontentement et de malaise des Français[].
« Réveil public d’un peuple qui était jusqu’à présent très passif » selon Edgar Morin[], cet engouement littéraire concrétiserait un nouvel engagement des citoyens hors des partis politiques[].
Je laisserai à Cafougnette le mot de la fin, qui m’a déclaré : «Mi, j’ai pas b’soin d’ rével pour m’indigner… Quind in intind chu qu’un intind pis qu’in ravise chu qu’in ravise, ej’ sus fin bénache ed’ pincher chu que j’ pinche ! »
Jean-Marie DUMARQUEZ